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Deux accouchements, deux expériences7 min de lecture

Juliette a deux enfants ayant un an d’écart. Son premier accouchement a été catastrophique, elle redoutait donc que le second soit pareil. Or, ce ne fut pas du tout le cas : la preuve que chaque accouchement peut être unique.

Comment se sont passées tes grossesses ?

Les deux se sont bien passées, sans problème particulier, hormis les désagréments classiques. J’ai adoré être enceinte.

Comment as-tu su que c’était le moment d’aller à l’hôpital ?

La poche des eaux s’est fissurée. Je suis allée à la maternité pour vérifier si c’était bien ça et pas des fuites urinaires. Comme c’était bien ça, j’ai été obligée de rester à l’hôpital. On m’a déclenchée car rien ne bougeait. On m’a perfusé de l’ocytocine, et on m’a percé la poche des eaux. J’ai accouché 47 heures après… 47 heures de travail, sans manger, en plein COVID donc avec personne dans la chambre – on a même oublié mon plateau repas. Je pense réellement que la période COVID a aggravé les choses. 

Comment s’est passé l’accouchement ?

Le bébé ne voulait pas descendre, donc l’obstétricien est venu. A savoir que la péridurale n’a jamais fonctionné. Il a sorti ma fille à l’aide de forceps et de spatules, ça a été très douloureux. On m’a fait une épisiotomie sans me le dire et sans anesthésie donc. Le bébé est sorti, rouge partout. Elle a eu des bleus pendant trois semaines à cause des spatules. Je n’ai pas pu la prendre dans les bras car j’avais une hémorragie : j’ai perdu deux litres de sang. Le médecin a fait la révision utérine sans me prévenir et sans croire que ma péridurale ne fonctionnait pas. La stagiaire en a fait une aussi. C’était hyper douloureux. Puis il m’a recousu, toujours sans anesthésie, en me disant : “C’est dans votre tête, la péridurale fonctionne”. Il a fait ça comme un boucher, 3 ou 4 points. Je n’ai jamais eu aussi mal de ma vie. Ce n’est pas l’accouchement qui a été douloureux mais son traitement à lui. J’ai fait du vaginisme pendant deux mois et demi car le muscle était traumatisé. 

Quand es-tu sortie de l’hôpital ? 

Je suis sortie deux jours après, en ayant reçu une transfusion. Le médecin en question n’est jamais revenu prendre des nouvelles. Il était froid, n’a pas échangé : j’avais l’impression de ne pas avoir le droit de ressentir ce que je ressentais. J’avais 21 ans, je m’attendais donc à être rassurée, un peu couvée comme une enfant. L’accouchement en silence avec les seuls mots prononcés étant pour me dénigrer, ce n’est pas ce à quoi je m’attendais. Je n’ai pas vu ma fille pendant une heure car il n’arrivait pas à arrêter l’hémorragie. Je suis retournée dans la chambre, seule, et personne ne passait à cause du COVID. 

As-tu pu allaiter ta fille ?

Je ne savais pas encore si je voulais ou non, mais la décision a été prise pour moi car on m’a donné un médicament pour arrêter la lactation sans me dire ce que c’était. C’est un grand regret pour moi. 

Comment s’est passé la suite du séjour sur place ?

Comme j’étais du métier, les gens se sont dit que je savais faire. J’aurais aimé qu’on montre aussi au papa, notamment le bain. Pour le premier bain de ma fille, ils se sont pointés à 5 heures du matin, sans nous prévenir, ils nous ont tous réveillés, ils l’ont déshabillée et mise dans le bain, sans que personne ne nous attende pour participer…

Et pour ton deuxième, quelle a été ton expérience ?

Déjà, j’ai changé d’hôpital. J’y ai eu un meilleur suivi. On m’avait dit qu’il ferait 4,5kg, donc j’ai encore eu un déclenchement. Avec le recul, je ne l’aurais pas fait. On m’a posé un ballonnet, mais il ne tenait pas et j’avais mal au dos. Après auscultation, on a remarqué que j’étais à 3cm de dilatation, raison pour laquelle le ballonnet ne tenait pas. J’avais démarré les contractions. J’ai été en salle de naissance, et, une fois de plus, la péridurale n’a pas fonctionné. Je m’attendais à ce que ça fasse plus mal que ça. Le cordon était un peu court donc le bébé remontait. On a fait une prise de sang par le col pour vérifier son oxygénation. Il s’engageait mais ne descendait pas. Le personnel a été très bienveillant, elles m’ont laissé le temps tout en envisageant la césarienne. Je me suis mise sur le côté et j’ai poussé de toutes mes forces pour qu’il ne se bloque pas dans le bassin. J’ai même demandé qu’on filme sa naissance. Du coup, j’ai vu mon fils sortir et je l’ai attrapé. Il n’y avait pas d’infantilisation mais du soutien de la part de l’équipe, de la bienveillance, de l’accompagnement. J’ai pu choisir ma position. On m’a laissé le temps qu’il fallait. 

Comment ça s’est passé pour la suite ? 

Je ne voulais pas répéter ni le premier accouchement ni le premier post partum, du coup j’ai surprotégé mon bébé. Il est aujourd’hui très attaché à moi, je j’allaite encore à trois ans. Il n’a jamais vraiment vécu avec son père (uniquement de ses 2 mois à ses 6 mois). Je pense que c’est pour ça que, parfois, il s’accroche à un homme adulte comme figure paternel, comme sa soeur. 

Pourquoi as-tu quitté le père ?

Je ne l’ai pas quitté tout de suite, parce que j’étais enceinte du deuxième. Mais c’est un pervers narcissique, et il y a eu un épisode de bébé secoué avec la petite. C’était un père absent dès le départ. J’ai eu honte d’avoir “mal” choisi, d’avoir pensé qu’il était la “bonne personne”. 

Que s’est-il passé ?

On est allé à l’hôpital parce qu’elle avait des vomissements. Je pensais que c’était une gastro. Aux urgences, ils lui ont fait une prise de sang et ont remarqué qu’il y avait une hémorragie interne. Ils ont fait un scanner. La petite avait été secouée. Elle a passé deux semaines à l’hôpital. Elle a eu des transfusions, un scanner tous les jours… Son père a avoué 9 mois plus tard que c’était lui (5 mois après les faits) en garde à vue. Je suis sûre que le petit a senti le stress in utero. J’avais vraiment honte que l’homme que j’avais choisi ait pu faire du mal à notre enfant et ne rien avouer après. Heureusement, elle n’a pas de séquelle. Mais s’il l’avait dit plus tôt, on aurait pu la soigner avant. 

Tu as donc eu deux expériences très différentes ?

Mon accouchement et mon post partum pour la première ont été horribles donc j’ai transféré sur le petit qui est aujourd’hui collé à moi. L’allaitement, c’était aussi pour le garder près de moi, en sécurité. Le père était désengagé, donc je me suis occupée des deux seule, et au final je réussis mieux en étant séparé de lui. Il n’avait pas le droit de voir la petite sans médiation, en revanche, il pouvait voir son fils sans problème. Aujourd’hui, cela fait quatre ans que je suis en procédure contre lui et j’attends le jugement avec anxiété.

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