Césarienne en urgence (bis repetita)7 min de lecture
Ariane a vécu le même accouchement deux fois, et deux post partum compliqués pour différentes raisons. Voici son histoire.
Comment se sont passées tes grossesses ?
Je n’ai pas eu des grossesses particulièrement difficiles comparées à d’autres. J’ai eu des nausées pendant 3 ou 4 mois pour les deux, une terrible fatigue pendant neuf mois, mais rien de plus. Pour la première, j’ai tout de même été hospitalisée à mon septième mois de grossesse, pour une présumée pyélonéphrite. C’était également pendant le COVID. Ce contexte anxiogène, enceinte, était loin d’être agréable, surtout que mon employeur de l’époque n’a pas du tout été compréhensif et a refusé que je fasse du télétravail, ce qui aurait été tout à fait possible dans mon cas.
Et tes accouchements ?
Très similaires. Pour mon premier, j’ai eu une fausse alerte, avec des contractions. Finalement, je suis rentrée de la maternité et j’ai perdu les eaux trois jours plus tard. Tout se passait bien, la dilatation se faisait progressivement. Les contractions me faisaient un mal de chien, je hurlais dans l’hôpital : la péridurale a été une bénédiction ! A 10cm, j’ai commencé à pousser, pendant une demi-heure. Malheureusement, le petit ne s’engageait pas dans le bassin. J’avais de la température et le rythme cardiaque du bébé a ralenti un peu. Le médecin a donc décidé de procéder à une césarienne en urgence. Je m’étais préparée à la possibilité tout en la redoutant. J’avais peur que mon compagnon ne puisse pas venir en salle d’opération avec moi, à cause du COVID. J’ai eu de la chance car il a pu être là tout du long : en salle de travail et pour la césarienne. Ca m’a énormément rassurée qu’il puisse être là. Tout s’est bien passé ensuite… C’était très dur car j’ai vu mon bébé deux minutes et ensuite ils l’ont pris pour les premiers soins pendant qu’on me recousait. Je le savais avec son papa, alors ça me rassurait, mais c’est quand même difficile de ne pas être avec lui pour les premières heures. J’ai passé deux heures en salle de réveil, seule, avant de voir arriver le papa avec le petit. J’ai dû attendre que les tremblements dus à l’anesthésie se calment pour pouvoir le prendre dans mes bras. C’était frustrant. Puis j’ai pu le prendre et ça a été un bonheur incroyable. Il a tout de suite trouvé le mamelon et a commencé à boire.
Et le deuxième accouchement ?
J’ai commencé à avoir des contractions. Cette fois, j’ai fait des exercices et ça se calmait, j’ai donc compris que c’était une fausse alerte, mais je me doutais que l’accouchement approchait. Trois jours plus tard, en plein milieu de la nuit, elles ont repris. Le grand s’est réveillé, il avait fait pipi au lit, pour la première fois. On n’arrivait pas à le rendormir et je sentais que les contractions se rapprochaient. J’ai appelé toute ma famille, en vain. Finalement, on l’a amené chez la voisine, en tambourinant à sa porte, et on a filé à l’hôpital. J’étais déjà à 4cm, je crois. C’est allé très vite, j’ai poussé une demi-heure, et même chose que pour le premier : elle ne s’engageait pas dans le bassin donc on a fait une césarienne en urgence. J’étais très déçue mais je savais que j’avais une chance sur deux pour que ça finisse comme ça. Heureusement, j’ai pu la voir plus vite que pour le petit, et les tremblements ont été moins forts que la première fois. Je l’ai prise dans mes bras et, pareil, elle a tout de suite trouvé comment se nourrir.
Parle-nous de ton premier post partum.
J’aurais beaucoup à dire, c’est une expérience incroyable. A la fois si belle et si difficile. J’ai passé les nuits à l’hôpital seule, à cause du COVID – le papa était là de 8h à 20h, mais il n’était pas autorisé à venir la nuit, je n’ai pas compris la logique. La récupération de la césarienne n’est pas évidente, comme se lever et marcher est douloureux. La mise en place de l’allaitement est aussi quelque chose de compliqué, je pourrais en parler longuement. Mais je vais me focaliser sur les deux événements les plus difficiles de mon post partum : à 15 jours de vie, le petit a commencé à se réveiller beaucoup et en pleurs. Il régurgitait énormément. On a su alors qu’il avait du RGO. Ca a été un enfer pendant des mois et des mois. J’ai eu des conseils de partout, je ne savais plus quoi faire et je suis sûre de l’avoir affamé sans le vouloir suite aux recommandations que je suivais. J’en porte la culpabilité encore aujourd’hui. Lorsqu’il a eu 1 mois, j’ai eu les mêmes douleurs que pour la pyélonéphrite. J’ai appelé SOS médecins, fait une échographie, pris mes antibiotiques et ça allait. A 4 mois, rebelote. Cette fois, j’ai appelé le SAMU et j’ai fini aux urgences. En réalité, ce n’était pas une pyélonéphrite, mais une appendicite – aujourd’hui, je suis certaine que je me la suis traînée pendant six mois. Ca a été pire que la césarienne : je me suis retrouvée seule à l’hôpital, séparée de mon bébé, à devoir me faire opérer. Je me souviens très bien, le matin de l’opération, j’étais dans mon lit, les seins qui coulaient, sans aucune force pour tirer mon lait et maintenir la lactation. L’opération a flingué mon allaitement : ça a été un vrai deuil. J’avais même refusé de prendre de la morphine malgré la douleur pour tenter de le maintenir. J’ai passé 24 heures loin de mon petit, mais ça a suffi à tout foutre en l’air, parce que je n’avais aucune force pour le nourrir après ça. Dix jours plus tard, je finissais de nouveau à l’hôpital avec un abcès à soigner. Cette fois, j’ai passé 5 jours loin de mon bébé. J’ai vécu un enfer. Bien sûr, il y a pire comme situation, mais ça a été très rude. Aujourd’hui, tout le monde va bien et j’ai eu la chance de ne pas faire de péritonite. Mais ce souvenir est le pire que j’ai.
Et ton deuxième post-partum ?
J’ai récupéré assez vite de la césarienne, malgré le fait qu’on m’ouvrait le ventre pour la troisième fois en trois ans. J’avais la volonté de me remettre vite sur pieds pour m’occuper de mes deux enfants. En revanche, ça a été très difficile physiquement et moralement : je ne suis pas passée loin de la dépression. J’ai nié pendant deux semaines le fait que ma petite faisait du RGO comme son frère parce que je le redoutais. J’étais épuisée, entre l’accouchement, la cicatrice, la privation de sommeil, les hormones en vrac… J’ai mis du temps à me remettre vraiment. J’ai la chance d’être bien entourée, et ça m’a sauvée. Que ce soit mon compagnon, ma famille, mes amis, ou le Club Poussette, ça a été une chance que de pouvoir me reposer sur eux. Devenir maman est de loin la chose la plus difficile que j’ai eu à faire. Mais je n’ai aucun regret. Tous ces moments difficiles ne sont rien face au bonheur qu’ils m’apportent au quotidien. Oui, ils me rendent folles (rires), mais ils sont mes rayons de soleil et me donnent une force que je ne me soupçonnais pas.